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Roland dans tous ses états
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Roland dans tous ses états
3 avril 2020

pourquoi je n'applaudis et n'applaudirai pas?

 

%Attac Saint-Marcellin

Il est 20 heures

Dans mon immeuble comme ailleurs, les habitants confinés viennent de se mettre à leur balcon ou leur fenêtre pour applaudir.

Pourquoi je n’applaudis et n’applaudirai pas ?
Je n’ai jamais applaudi le pilote qui fait atterrir son avion et les passagers

dont il a la responsabilité.

La question (et le réel problème), ce n’est pas celles et ceux qui effectuent leur travail, c’est dans quelles conditions et avec quels moyens elles et ils sont condamné-e-s à l’effectuer, et incidemment quelles conséquences cela a sur celles et ceux qui dépendent des conditions d’exercice de leur travail, conditions qui éventuellement et en l’occurrence, nous condamnent à la mort avec la faillite organisée du système.

L’héroïsation nous divertit.

Les applaudissements pour nos héros à 20 h, ou comment se rassurer à bas prix et s’acheter une conscience de façade...

Revenons au pilote, s’il a les conditions de travail nécessaires et tous les moyens matériels et humains à sa disposition pour réaliser correctement sa tâche — si la compagnie ne lui a pas fait effectuer 3 rotations à la suite, si elle n’a pas économisé sur le carburant risquant la panne sèche, ou sur l’entretien et les contrôles de l’avion, si le co-pilote n’est pas trop épuisé non plus de ses horaires et du stress induit, si le fabriquant n’a pas dégagé de la marge sur la qualité d’une pièce et n’a pas maltraité les salariés qui l’ont construit... heureusement qu’il fait atterrir l’avion sans encombre.

Mais l’on voit bien que cela tient à un système entier de règles, de conditions de travail, de moyens matériels et humains.
Règles et moyens dont le capitalisme ne s’encombre pas, cherchant uniquement le profit et la rentabilité à outrance.

Et c’est par exemple ainsi qu’un pilote qui doit réaliser un exploit pour faire atterrir son avion en panne de kérosène est applaudi et érigé en héros s’il y parvient.

Mais comment en est-on arrivé à ce qu’il n’y a pas assez de carburant pour prendre en compte un élément prévisible de retard d’atterrissage

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%Attac Saint-Marcellin

possible ou un événement extérieur quelconque, sinon le profit recherché jusqu’à ce point par les actionnaires et les dirigeants ? Les applaudissements au pilote auront-ils résolu la situation pour que cela ne se reproduise plus jamais ? Ou faudrait-il mieux agir autrement ?

La question, c’est donc bien que ceux qui aujourd’hui sont érigés en héros — chacun avec sa méthode, mais unanimement, réclament des moyens et alertent depuis des années sur la ruine du service public de la santé (idem pour les autres services publics), dans un silence assourdissant uniquement rompu par le bruit des matraques, des LBD, des grenades de désencerclement et lacrymogènes lorsqu’ils ont osé le dire dans la rue — pas il y a des années, mais encore quelques jours avant l’épidémie !

Où étaient tous celles et ceux des jeux de 20 h aux fenêtres et aux balcons, à la mode depuis quelques jours ?

Quel soutien ont-ils apporté aux alertes et aux revendications impérieuses qui étaient mises en lumière ?

Combien de celles et ceux qui applaudissent — si courageusement, ont tenu depuis 30 ans le discours des « fonctionnaires fainéants et trop payés, privilégiés voire parasites » qu’il fallait renvoyer à la réalité de l’économie ultra libérale et qui n’avaient qu’à changer de métier si le confort de leur situation ne les satisfaisait pas ?

L’urgence est à un changement radical du système, à redonner à tous les services publics tous les moyens nécessaires à leurs missions, absolument tous et immédiatement. À sortir sans délai de l’approche comptable et financière mortifère qui ne doit pas, absolument pas et plus jamais, définir dogmatiquement par la financiarisation et la capitalisation les moyens à disposition.

Moyens matériels, mais aussi humains. Tout est à reconstruire et à reconquérir.

D’ici là, plutôt que d’applaudir des héros pour nous rassurer, nous ferions mieux de combattre, huer et condamner tous les responsables et dirigeants politiques de ces 40 dernières années qui nous ont inexorablement amenés à cette crise sanitaire et sociale, en organisant la faillite de tout ce qui avait été gagné et mis en place pour l’éviter après- guerre avec le Conseil National de la Résistance, en imposant la rigueur et les coupes budgétaires menant aux suppressions de lits, des personnels soignants, de matériels et d’équipements, de services et d’hôpitaux entiers, et qui ont ruiné entièrement et pas-à-pas tout notre système de protection sociale, de l’assurance maladie à l’assurance retraite en passant

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%Attac Saint-Marcellin

par l’assurance chômage et tous les services publics associés, sacrifiés sur l’autel de la finance, des actionnaires et des dividendes et cédés aux intérêts privés ou supprimés morceau après morceau (tout cela s’applique aussi pour les autres services publics et nous le paierons très cher).

La recherche, notamment médicale dans toutes ses composantes, et l’industrie pharmaceutique doivent être 100 % publiques, les lobbies doivent être interdits, les laboratoires doivent être nationalisés, la santé privée doit être confisquée et tous ses moyens mis au service du seul système de santé publique ainsi rebâti nécessaire à la population.

Aucune notion de rentabilité ne doit décider des moyens nécessaires, car l’on voit où cela mène : nous y sommes !

C’est maintenant que nous devons agir, certainement pas en nous laissant divertir pour applaudir celles et ceux qui exercent leurs métiers dans des conditions dégradées, inhumaines et inacceptables et en les oubliant dans quelques mois voire quelques semaines, mais en forçant les responsables à agir pour une rupture radicale et immédiate avec le système qu’ils ont mis en place et défendent coûte que coûte contre les Peuples, peu importe que nous en mourions ; et s’ils ne le font pas, nous avons le devoir de prendre le pouvoir collectivement, afin de mettre en place un système social et solidaire utile à toutes et tous et pas seulement aux riches et aux puissants. Sinon, cette crise sanitaire et sociale sera très certainement la première d’une longue liste dans les prochains mois ou prochaines années.

Je serai aux côtés de celles et ceux qui refusent le capitalisme et ce qu’il fait par nature subir aux Peuples en les exploitant jusqu’à la mort.

L’heure est à la lutte, plus que jamais, contre tous ceux qui pour sauver le capitalisme et la finance, sont en train de mettre en jeu des centaines de milliards d’euros et de dollars pour le capital et les entreprises. Les mêmes qui disaient hier qu’il n’y avait pas d’argent pour les travailleuses et travailleurs, pour les services publics, qui ont privatisé et financiarisé des pans entiers de l’économie, et qui utilisent la crise sanitaire aujourd’hui pour terminer de casser nos droits et nos libertés individuelles et collectives de façon violente et autoritaire, au moment même où toute mobilisation est impossible, alors même qu’elle (la crise) est le résultat des politiques qu’ils ont imposées aux Peuples.

Le cynisme de cette situation doit nous éclairer et nous obliger à agir vite et collectivement !

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%Attac Saint-Marcellin

Nous n’avons pas besoin de héros, nous avons besoin de moyens publics, gérés par et pour le Peuple ! Cela passe par la nationalisation immédiate et intangible de tous les services et besoins de base et des entreprises et industries concernées, sous contrôle des salarié-e-s par la socialisation des moyens de production et des bénéfices : santé énergie eau recherche transports emploi éducation équipement postes et télécoms, etc. En dehors de toute compétition et d’intérêts privés, libérés de toute marchandisation et financiarisation, les services publics rentables financeront les services publics déficitaires, au service plein et entier de la population.

C’est à cela que les milliers de milliards d’euros et de dollars doivent être utilisés (ils ne sont qu’une petite part de tout ce qui a été volé au travail et à celles et ceux qui produisent ou œuvrent dans leurs missions de service public depuis des décennies). Certainement pas à sauver le capitalisme qui nous a menés à la ruine sociale ni les entreprises qui le mettent en œuvre. Celles qui sont essentielles aux besoins de la population doivent être (re) nationalisées à 100 %. Les dividendes et les profits doivent être confisqués et investis dans les embauches, les salaires, l’amélioration des conditions de travail et de santé et sécurité au travail, dans l’outil de travail, les licenciements doivent être interdits, les salaires doivent être assurés partout à 100 % en utilisant une part de cet argent issu de la force de travail et de la production. Les salariés précaires doivent être massivement embauchés en stable.

Celles et ceux à qui ces applaudissements sont destinés ne sont pas déméritant-e-s, bien au contraire.

Mais cela me donne la nausée et n’est rien moins qu’une capitulation par acceptation et fatalisme même si elle n’est pas consciente, devant les responsables et les coupables de cette hécatombe sociale !

Au contraire de les aider, à terme cela les enfermera un peu plus prisonniers et nous avec, du système capitaliste qui les empêche de mener à bien et normalement leurs missions.

Définitivement, non, je n’applaudis et n’applaudirai pas !

4

Philippe TIXIER, Syndicaliste CGT.

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Commentaires
P
Je continuerai à applaudir et à taper sur mon fond de casserole ayant manifesté mon soutien précédemment aux personnels soignants. De plus, cela fait un lien social supplémentaire avec mes très divers voisins d'en face avec qui je me retrouve chaque soir à 20 heures.
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