"Extases", Ernest Pignon Ernest à l'église de l'Abbatiale St-Pons, à Nice
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Dominant l'hôpital Pasteur, à Nice Est, l'église de l'Abbatiale Saint-Pons était jusqu'à présent plutôt assoupie, pour ne pas dire décrépite.
L'artiste Ernest Pignon Ernest, dont la rétrospective se donne à voir au Mamac de Nice jusqu'au 08 janvier 2017, nous a souvent présenté des oeuvres politiques, destinées être exposées dans la rue (cf. le reportage sur l'exposition sur ce même blog).
Mais nous avons déjà vu des dessins de sa main empreints d'une spiritualité certaine, notamment à la galerie Lelong de Paris à l'occasion de ses travaux sur une prison lyonnaise : exposition Linceuls (dont un reportage sur ce même blog est disponible également).
Ici, c'est à une véritable immersion dans la spiritualité que le visiteur est convié.
A l'entrée de l'Abbatiale un lourd rideau obscurcit l'intérieur de l'édifice. C'est déjà en soi un choc. Perte des repères. S'avancer en veillant à ne pas se heurter à un obstacle. Mais l'oeil accomode rapidement et découvre une mise en scène aussi baroque que l'architecture et le décor de l'église.
Un cycle de lumière passe de l'obscurité à un dévoilement progressif de la scène, et des quelque huit personnages de grandes mystiques chrétiennes, " en extase", dont la hauteur légèrement supérieure à la taille humaine plonge le spectateur devant une beauté rehaussée par le fait que les visiteurs ne se voient quasiment pas et sont comme en tête-à-tête avec les personnages, dont l'attitude force le respect.
Ce dispositif consistant à placer le visiteur face à l'oeuvre dans l'obscurité n'est pas sans rappeler celui de l'exposition du vidéaste Bill Viola qui a eu lieu au Grand Palais à Paris (cf. reportage sur ce même blog)
Parfois, selon l'éclairage, certains éléments décoratifs de l'église - comme ce tableau rouge au fond du Choeur - participent du spectacle.
Il en est de même pour les colonnes et sculptures de l'église qui elles aussi sont convoquées.
Les dessins sont exécutés sur de grands panneaux blancs figurant des feuilles issues du fameux papier journal récupéré des chutes de rotatives que l'artiste niçois utilise depuis longtemps.
Mais ceux-ci sont installés sur un espace aquatique sur fond noir, faisant miroir, ce qui produit un effet de profondeur et de réflexion en symétrie aux reflets quasi vertigineux.
Au fil de la variation de l'éclairage les formes et les couleurs se modifient insensiblement, du noir et blanc au sépia.
Le dessin est comme toujours chez cet artiste superbe, les drapés magnifiques ...
... de sorte que l'on finit presque par croire voir des statues en trois dimensions et non des dessins.
Les courbes et contre-courbes - élément essentiel du style baroque - du papier sont parfaitement intégrées au propos.
L'on en sort à regret (et en plus, c'est gratuit!) persuadé d'avoir vécu une expérience originale dans un autre Monde, qui marque profondément le visiteur.
JUSQU'AU 02 OCTOBRE 2016
du mercredi au dimanche de 15 h à 18 h.
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