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Roland dans tous ses états
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Roland dans tous ses états
15 janvier 2014

Etincelles de Christian Bobin 13

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13

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Dans un café, une télévision ouverte. Le son est coupé. Des images qui s’abattent les unes sur les autres, comme les cartes d’un jeu qui semble pouvoir durer pendant des siècles, jour et nuit. Soudain sur l’écran, un camp de concentration, des juifs à qui des bourreaux coupent la barbe en éclatant de rire. Dans le café, personne ne remarque cette scène, vite chassée par une autre, puis par des publicités. Eclats des voix, tintement des verres : la vie désenchantée poursuit son cours que rien n’arrête. Lorsque l’on me parlera désormais de cette niaiserie d’une « civilisation de l’image », je penserai à ce café, à ces images sacrées – comme sont toutes les figures de la douleur – perdues dans l’indolence d’un jour d’été, profanées, oui, profanées, souillées d’être aussi aisément disponibles, toile de fond, décor pour un commerce. Ces gens que j’ai entrevus sur l’écran ont vécu, espéré, craint, sué une angoisse pire que la mort. Leurs visages sont maintenant dans la fosse commune d’images où vont puiser les industriels de la télévision : tout s’y vaut, tout y est une seconde fois oublié, maltraité, humilié. La création, par l’invention d’une forme close, protège, recueille le réel. L’industrie – et la télévision n’est que cela – détruit, et avec elle grandit, non pas une civilisation, mais bien une barbarie de l’image.

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Je ne vois rien à ajouter à cela, si ce n’est que la télévision peut être parfois un vecteur de création ; son mode de diffusion, lui,  relève de l’industrie.

 

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